Onboarding : passage obligatoire

“Vous ne pouvez pas garder les contractuels et les freelances de côté dans votre entreprise : vous devez les traiter comme faisant partie de votre écosystème global afin de déterminer comment ils vont collaborer avec vos employés à temps plein.”

Erica Volini, co-auteure du Human Capital Trends Report publié par Deloitte, met en lumière la nécessité de placer freelances et salariés sur un même pied d’égalité.

D’après ce même rapport, seuls 54% des entreprises ont mis en place un vrai processus d’onboarding pour les travailleurs non-salariés (consultants, freelances, intérimaires). Pourtant ce processus pose les bases d’une collaboration efficace et ne doit pas être négligé.

Transmettre sa vision rapidement

En accordant de l’importance à l’onboarding d’un freelance, il va s’imprégner de la culture et des valeurs de votre entreprise. Par conséquent, c’est l’assurance que son travail sera en parfaite adéquation avec votre vision et vos attentes. Comme le reste de votre force de travail, il aura une idée précise de ce qui correspond à l’ADN de votre entreprise.

Autrement dit, un vrai accueil vous assure un résultat optimal. Le réel retour sur investissement résulte du fait qu’onboarder un freelance représente un temps moindre comparé à l’intégration d’un nouvel employé. Lui présenter les bases suffira à ce qu’il assimile parfaitement l’identité de votre organisation et de votre marque. 

Bien commencer pour bien avancer

Un onboarding inexistant ou incomplet est aussi source de coût pour votre entreprise. De temps et d’argent. Entre les allers-retours correctifs, les imperfections et les ré-ajustements dus à une incompréhension initiale, c’est tout le projet qui en pâtit. Les délais ne sont pas respectés, certaines prestations n’étaient pas comprises dans le devis de départ… Bref, vous n’êtes pas satisfait et le freelance non plus. On ne le dira jamais assez : mieux vaut prévenir que guérir. 

Pourquoi un bon onboarding est impactant dans la durée

D’autre part, onboarder correctement un freelance va vous permettre de soigner votre marque employeur. De la même manière qu’une entreprise peut avoir un impact sur la réputation d’un freelance, le freelance a un pouvoir sur la réputation de votre entreprise. Lui faire sentir qu’il n’est qu’un prestataire lambda présent pour une très courte durée vous desservira nécessairement une fois la mission terminée. Outre le ressentiment pouvant altérer la qualité de son travail, il n’hésitera pas à vous présenter comme “mauvais client” auprès de son réseau (d’amis comme de freelances).

Soigner sa marque employeur passe aussi par un offboarding réussi. En réalité, l’onboarding et l’offboarding sont étroitement liés et il est important de réussir les deux. En fin de mission, récupérer le feedback du freelance va vous permettre :

  • D’identifier ce qu’il pense de l’entreprise,
  • Ce qu’il pourrait en dire,
  • Ce qui pourrait être amélioré.

Finalement, mettre un point d’honneur à bien onboarder un freelance au sein de votre organisation ne présente que des avantages et s’inscrit dans une démarche à long-terme

Un onboarding réussi en 4 étapes

En premier lieu, la durée et le degré de sophistication de l’onboarding d’un freelance vont dépendre du degré d’implication du freelance dans votre projet et votre entreprise.

Accueillir

Commencez par lui démontrer que sa mission et ses tâches viennent s’inscrire dans les objectifs de votre organisation. Un freelance n’a pas envie d’avoir le sentiment qu’il intervient ponctuellement sur une tâche sans incidence.

Dans cette même démarche, réservez-lui le même accueil que s’il s’agissait d’un employé. Prévenez vos équipes en amont, prévoyez une visite de vos bureaux lors de laquelle il pourra se familiariser avec l’espace de chaque outil et personne. Suite à cette visite, un kick-off où tous les collaborateurs se présentent et décrivent leur rôle et tâches montrera au freelance qu’il a sa place dans votre entreprise. Ça y est : il fait partie de votre entreprise.

Le conseil crème : si le freelance auquel vous faites appel ne travaille pas 100% en remote, attribuez-lui un poste de travail. Il se sentira valorisé et d’autant plus à sa place. 

Informer

Ici l’enjeu est de trouver un juste milieu dans la quantité d’informations que vous allez lui communiquer. En étant trop avare, il risque de manquer du nécessaire pour mener à bien sa mission. A contrario, le noyer sous un flot d’informations le dispersera de son objectif.

Veillez donc à ce que tous les détails du projet soient à sa disposition lors de son arrivée : briefs, version antérieure d’un logiciel etc.

À titre d’exemple, un directeur artistique freelance aura besoin d’assimiler votre marque et son esprit avant de pouvoir travailler. Il faudra par conséquent lui fournir tous les documents nécessaires : stratégie marketing, guide de marque, éléments constitutifs, guidelines etc. 

Écouter

L’écoute est le socle de toute relation qui fonctionne.

Dès le premier jour, assignez le freelance avec une personne de vos équipes. Cette personne sera sa référence pendant toute la durée du projet. Il aura ainsi un repère pour répondre aux questions, faire la liaison entre les parties prenantes, prodiguer de l’aide ou des conseils. Cette relation directe et privilégiée facilite l’assimilation de la culture et de la structure de votre entreprise par le freelance.

Malgré ce point de repère humain, intervenez régulièrement pour vous assurer que tout se passe bien. 

Mesurer

Pour garantir la bonne conduite de votre projet, il est important d’en assurer le suivi de manière régulière. Dès le début, soyez clair sur :

  • La fréquences des meetings récapitulatifs avec le freelance,
  • Quelle personne est en mesure de valider telle avancée ou telle étape du projet,
  • La fréquence à laquelle vous attendez des updates de la part du freelance.

Un métier émergent : Chief Freelance Officer

En outre, il est possible d’internaliser ce processus d’onboarding par le biais d’une personne de votre organisation. Le métier de Chief Freelance Officer émerge petit à petit dans plusieurs start-up et entreprises françaises. Même si le titre est éloquent, son champ d’intervention est large et son rôle varie en fonction de l’organisation et des process en place.

J’ai discuté avec Guillaume, Tech Community Ambassador chez Deezer, qui m’a parlé de son métier et de l’impact qu’il a sur l’entreprise, et les freelances. Il consacre aujourd’hui 10 à 30% de son temps à la gestion du freelancing tech, depuis l’expression du besoin, l’identification du prestataire adéquat et son intégration dans l’effectif Engineering.

Gérer la ressource humaine externe

Initialement à la tête du pôle recrutement tech au sein de la DRH de Deezer, Guillaume a souhaité évoluer sur un rôle nouveau, au plus près du quotidien des équipes Engineering.

Son rôle de Tech Community Ambassador est double :

  • Proposer des opportunités d’apprentissage, souvent des retours d’expérience (meetups, Brown Bag Lunches, conférences etc.) sur des technologies, process ou organisation entre les équipes techniques de Deezer et des communautés de pratiques externes (entreprises, réseaux tech, experts indépendants).
  • Gérer le freelance du sourcing jusqu’à son départ et accompagner les équipes lors des expériences d’apprentissage, pour les aider à monter en compétences.

Désormais, il fait partie de la direction technique et accompagne les freelances et consultants de l’équipe tech sur des périodes limitées. Certains projets n’étant pas prévus dans la roadmap annuelle, Deezer a ponctuellement besoin de renforts externes, comme par exemple pour le lancement de l’application au Moyen-Orient et au Maghreb, qui nécessitait un travail d’intégration de partenaires de paiement locaux, ou bien encore pour le développement de l’application Radio by Deezer au UK.

L’accueil : premier pas d’une bonne collaboration

L’onboarding fait donc partie intégrante de son travail. Pour assurer la bonne intégration d’une personne non-salariée, Guillaume doit s’assurer qu’il n’y ait aucun différentiel entre ce qu’il présente au freelance et la réalité du “terrain”. Il veille donc à ce que le discours soit clair et que le contexte, les équipes et les projets ne soient pas exagérés. En revanche, il est essentiel que l’expérience du freelance soit en accord avec la présentation des valeurs et du quotidien de Deezer.

Les attentes d’un prestataire sont différentes de celles d’un salarié à temps plein. Il convient donc d’être très transparent sur ces sujets. Comité d’entreprise, avantages en nature etc. : une organisation ne peut pas offrir aux freelances les mêmes avantages qu’à ses employés.

La durée est limitée mais s’intégrer est une nécessité

Chez Deezer les freelances travaillent sur des périodes relativement courtes et ne sont donc jamais en remote à 100% du temps.

Les premières heures sont extrêmement rigoureuses et comme un salarié à temps plein, le freelance découvre l’entreprise dans son ensemble afin d’être intégré à son quotidien. Guillaume le rattache ensuite aux personnes partageant ses intérêts pour faciliter son intégration aux équipes. La particularité de Deezer : les prestataires sont supervisés par un lead mais sont aussi intégrés dans leur communauté de pratique. Ensuite, ils sont soumis aux mêmes contraintes que les salariés : daily scrums, sprints de 15 jours… Tout ça est nécessaire pour favoriser leur intégration.

Dans la vie de l’entreprise aussi les freelances ont leur place : ils peuvent participer aux événements internes (meetups, BBL) ainsi qu’aux petits-déjeuners hebdomadaires ou aux présentations des actualités de Deezer. Certains sujets confidentiels sont même partagés avec eux.

En termes de suivi, Guillaume n’organise pas de point chaque semaine avec chaque freelance, sauf s’ils le sollicitent directement. Il est un tiers de confiance entre le freelance et le manager : il veille à ce que toute interrogation ne reste pas sans réponse. 

Un métier qui a de l’impact

Finalement Guillaume s’efforce d’optimiser le potentiel des équipes Engineering, afin de les mettre dans les meilleures conditions pour être performantes. En outre, il identifie clairement les besoins en externalisation pour mieux les gérer. Ainsi, il facilite le quotidien de toutes les équipes en instaurant des process fluides et limitant la cassure entre deux périodes où il est nécessaire de faire appel à un expert externe. Depuis que son poste existe, des freelances ont été recrutés en CDI et le sentiment d’appartenance a été renforcé. Il ne serait d’ailleurs pas contre rencontrer d’autres “facilitateurs du quotidien” ou autres Chief Freelance Officers issus d’autres organisations.

En synthèse

Ce processus d’onboarding, en théorie simple à mettre en place, est primordial pour que votre collaboration avec un freelance se déroule le mieux possible.

Non seulement vous ferez apparaître votre organisation comme étant moderne et ouverte auprès du freelance (et de son réseau). Mais vous poserez la première pierre d’une collaboration fructueuse, harmonieuse et efficace dont vos équipes, votre organisation et vous-même sortiront plus agiles.