
Comment répondre à la question "tu fais quoi dans la vie ?" sans ennuyer l'autre, ni réciter son CV ?
À chaque fois qu'on te pose cette question, c'est une nouvelle occasion de créer un lien qui amènera peut-être des opportunités.
Salut, je m'appelle Julien de Sousa et j'ai un métier qui n'est pas toujours simple à expliquer : à la fois, je développe une boîte (donc je fais 1000 métiers) et aussi, je parle devant des gens pour leur expliquer comment mieux parler...
La boîte que je développe, c'est Panache : un organisme de formation en prise de parole qui t’accompagne et te permet de devenir plus éloquent(e), plus convaincant(e), plus impactant(e).
Donc quand on me demande "tu fais quoi dans la vie ?", mes réponses ne pourront jamais être aussi simples que : docteur, comédien ou boulanger.
Pire, les réactions peuvent même me desservir :
- "Je suis formateur en prise de parole " > ah ouais donc le mec doit savoir manipuler.
- "J'ai monté une boite de formation en rhétorique" > excusez-moi monsieur l'infopreneur-arnaqueur, et tu veux de la feta avec ton melon ?
- "Je préfère réussir ma vie que dans la vie" > Erreur 404.
D'ailleurs, parfois, j'ai tellement la flemme de parler de mon métier - car à cette question, les gens attendent que tu donnes ta fiche ONISEP - qu'il m'arrive parfois d'utiliser ma carte "comédien de doublage".
J'ai un rêve de gosse : j'aimerais un jour être "comédien de doublage", prêter ma voix à des personnages fictifs, et encore + dans des dessins animés.
Alors, pas plus tard que le weekend dernier à une Pool Party (Marseille oblige), lorsqu'une fille m'a demandé "tu fais quoi dans la vie ?", j'ai utilisé cette carte.
"Je suis la voix de Simba enfant dans le Roi Lion de 1994, j'ai aussi prêté ma voix à tel et tel perso dans ce Pixar, ce Disney..."
S'ensuit toujours beaucoup de curiosité, des imitations et même des notes vocales envoyées à des inconnus : "Géraldine, je suis avec la voix de Simba c'est dingue, écoute-le...".
Passé une dizaine de minutes à jouer la comédie, je leur révèle toujours que c'est une joke, que c'est le métier que j'aurais adoré faire, et que je fais un peu de théâtre / stand up / impro à côté pour me marrer.
Les gens en rigolent, la glace est brisée, mes talents de comédien sont félicités et on poursuit la soirée à parler de nos métiers rêvés et à chanter du karaoké ("Nants ingonyama bagithi baba" - vraies paroles du Roi Lion).
Parfois, je ne veux pas du tout parler boulot, je veux juste connecter autrement.
Et plus tard, les oreilles seront peut-être plus attentives à écouter mon taf.
Alors non, ne lâche pas des mythos pour faire l'intéressant-e, mais utilise une stratégie différente en fonction des contextes.
En fonction du contexte, tu n'as pas les mêmes cartes à jouer pour te présenter. Les enjeux ne sont pas les mêmes et l'approche doit être différente. Alors, je me suis amusé à classer ces situations de la + business oriented à la + light avec la meilleure stratégie à adopter pour chacune d'elles.
Ton objectif est de montrer ton expertise et d'apporter déjà de la valeur à l'autre.
>> Stratégie : Utilise un langage clair et spécifique à ton domaine.
Par exemple, au lieu de dire simplement "je suis formateur en prise de parole", tu peux dire "j'aide les [cible en lien avec le prospect] à maîtriser l'art de la rhétorique pour améliorer leur impact lors de présentations et de réunions importantes".
Ensuite, partage un exemple concret de réussite : "Par exemple, récemment, j'ai aidé le CEO d'un grand groupe à réussir sa présentation lors d'un board stratégique grâce à des techniques de persuasion efficaces. Ceci lui a permis d'avoir un actionnaire qui souhaite investir + dans le groupe." (véridique).
Ton objectif est de démontrer ta légitimité, ta crédibilité et ta compétence.
>> Stratégie : Prépare une présentation concise de ton parcours et de tes réalisations sans réciter ton CV.
Par exemple, "Bonjour, moi, c'est Julien de Sousa, fondateur de Panache, une entreprise spécialisée en rhétorique. Ces 5 dernières années, on a aidé plus de 7000 personnes à améliorer leur communication orale et je suis surtout ravi d'en savoir plus sur chacun de vous et vos enjeux du moment."
Cela permet de glisser tes infos clefs et surtout de relancer et montrer que tu es déjà présent et curieux de la suite.
Ton objectif est d'être concis et de déterminer si le profil face à toi est intéressant d'un point de vue business.
>> Stratégie : Adopte une approche interrogative et engageante.
Par exemple, "J'aide les pros comme vous à se créer des opportunités grâce à des prises de parole réussies. C'est quoi votre métier ? Et votre rapport à la prise de parole dans celui-ci ? Qu'aimeriez-vous changer par exemple ?"
Cela permet non seulement de te présenter rapidement, mais surtout de récolter des informations sur le profil de ton interlocuteur, ses besoins potentiels, son rôle de décisionnaire, ou pas.
Ton objectif est de divertir d'abord, puis de déterminer si le profil face à toi est intéressant d'un point de vue business.
>> Stratégie : Utilise une approche plus légère et intrigante.
Par exemple, "Je transforme les gens en orateurs captivants. Vous seriez surpris de voir à quel point quelques techniques peuvent changer une prise de parole. Et vous, qu'est-ce qui vous passionne dans votre travail ?"
Cela permet de détendre l'atmosphère tout en orientant la discussion vers des sujets professionnels pour baliser l'intérêt ou éventuellement s'enfuir vers les petits fours.
Ton objectif est de sympathiser, de laisser une trace agréable et d'avoir du rab de tiramisu discreto.
>> Stratégie : Sois plus personnel et partage des anecdotes.
Par exemple, "En tant que formateur en rhétorique, j'ai eu des situations assez amusantes. Comme cette fois où j'ai aidé un CEO à préparer un discours dans lequel il a embarqué toute son équipe avec un travail sur les 5 sens et des savons vieux de 50 ans." (véridique).
Cela suscite de la curiosité, de la matière à la discussion et rend ta présentation mémorable et sympathique.
Ton objectif est de sympathiser, point.
>> Stratégie : Sois simple et honnête (pas de mytho sur Simba).
Par exemple, "Je forme les gens à mieux parler en public, mais toi dis-moi comment tu connais untel ?"
Cela évite de monopoliser la conversation avec ton job et renforce les liens personnels qui sont à privilégier dans ce genre de soirées. Si la personne te pose des questions sur ton job, alors là, tu peux donner plus de détails, sinon va faire un Perrier Pong avec elle.
Peu importe le niveau de businessitude derrière "tu fais quoi dans la vie ?", il y a une attitude plus globale à avoir. Car les réponses ne sont jamais toutes prêtes, elles sont surtout dégainées en fonction de ce que tu vas entendre.
La manière dont tu te présentes est aussi importante que ce que tu dis.
J'ai fait des milliers d'appels avec des prospects, j'ai assisté à des centaines de salons, j'ai animé des dizaines d'entretiens d'embauche, j'ai été invité une fois à un dîner dans le noir, et j'ai noté quelques attitudes à adopter pour maximiser l'impact quand tu te parles de toi.
- Écoute d'abord : Montre un intérêt sincère pour ton interlocuteur avant de parler de toi. Pose des questions comme "Et toi, qu'est-ce que tu fais dans la vie ?" avant de parler de ton propre parcours. Les gens adorent parler d'eux, donc fais-les parler et écoute-les.
- Questionne d'abord : Enchaîne avec des questions pertinentes pour comprendre les besoins et intérêts de ton interlocuteur. Par exemple, "Comment gérez-vous la communication dans votre équipe ?" Cela montre que tu es attentif et intéressé par ce qu'ils font.
- Note les infos pour les intégrer : Retiens des détails spécifiques que tu peux utiliser pour renforcer ton discours. Par exemple, si quelqu'un mentionne qu'il anime souvent des formations, tu peux dire "Quand j'ai travaillé avec une formatrice, elle me partageait aussi que l'introduction de son intervention était cruciale pour motiver les participants le reste de la journée, est-ce aussi un enjeu pour vous ?".
- Intéresse-toi pour de vrai : Montre un intérêt authentique pour la personne en face de toi. Par exemple, si ton interlocuteur parle de ses passions, rebondis dessus avec enthousiasme et partage éventuellement des expériences similaires.
- Capte les points communs : Trouve des points communs pour créer une connexion. Par exemple, "Mais non, vous avez vécu à Tahiti ? Moi aussi, en 2018 lorsque je dirigeais le premier incubateur du Pacifique. Où avez-vous déjà voyagé là-bas ?". Cela fonctionne aussi pour les relations en commun "Oh, vous connaissez aussi Alex ? Elle m'a beaucoup aidé lors de mes débuts en formation."
Au mieux, tu t'intéresses à l'autre, au plus il/elle va t'écouter et s'intéresser à toi par mimétisme. Donc quand on te posera des questions, tu pourras enfin donner plus de détails sur toi. Encore faut-il apporter les bonnes réponses et être concret, clair et concis.
Trop souvent, dès que tu te retrouves dans un environnement professionnel, tu as le don de rendre complexe des choses simples. Tu n'es pas le/la seul.e, tout le monde jargonne. C'est un moyen d'affirmer ton expertise mais aussi d'exprimer ton appartenance à une tribu sociale (ton entreprise, ton association, ton domaine, ton métier, ton club de sport...).
Congruence, prosodie, sophisme, anaphore... tu vois, même chez Panache on peut vite tomber dans notre jargon.
Alors, il est utile de connaître un modèle pour adapter ton langage dès les premiers instants : la pyramide de clarté.
La pyramide de clarté. Des anecdotes car concrètes et faciles à appréhender.
De la base au sommet, il existe 4 niveaux de langage que l'être humain utilise pour se faire comprendre, du plus accessible (1-la base) au plus complexe (4-le sommet).
Tout le monde le comprend, car c'est le niveau de langage utilisé tous les jours. Celui de l'histoire : le souvenir de tes vacances, le secret que Jennifer t'a partagé, les témoignages que tu partages sur les coulisses d'un projet, l'utilisation d'un produit testé... tout est prétexte à une histoire et tout le monde adore ce niveau de langage, car il est concret et facile à appréhender.
Aussi très simple à comprendre car il suffit d'utiliser une image connue de tous pour parler de ton job. Par exemple, apprendre la rhétorique, c'est comme apprendre à conduire. Au début, il faut maîtriser plein de gestes et on peut se sentir paumé, mais à la fin, on n'y pense plus et on adapte simplement notre style aux conditions de la route / de la prise de parole. Le but est de rendre accessible ton idée à un plus grand nombre.
Il permet de représenter et de décrire comment fonctionne quelque-chose : une méthodologie, un process, des règles de fonctionnement, un business model... Cette pyramide de clarté est un modèle par ex. C'est un peu comme si je te faisais un dessin pour que tu visualises mieux ce que j'essaye de te dire alors que concrètement ça n'existe pas dans la nature.
Celui des grandes idées et des grandes théories. Le niveau conceptuel est celui que préfèrent toutes nos élites : les politiques, les penseurs, les philosophes, les stratèges... Il est important pour contribuer au progrès de notre humanité. Mais il n'est pas compris du plus grand nombre, et il a le défaut de pouvoir être utilisé pour dire tout et n'importe quoi dans n'importe quel sens, en donnant l'illusion d'une pseudo-expertise. Un exemple avec
Si même Google Images n'arrive pas à illustrer ton mot / sujet, alors c'est qu'il est trop conceptuel pour un cerveau humain.
Alors quelle est la meilleure stratégie à adopter pour être compris d'un maximum de personnes ?
Quand tu te présentes, si tu as des choses complexes à partager, aie toujours le réflexe de faire simple au début et d'y aller progressivement.
Tu guides ton public sur le chemin de tes idées, tu prends soin de lui. Tu ne commences pas une rando avec une pente à 18%. Donc, tu dois faire preuve d'empathie.
Et le mieux est de rester simple, concret et concis de bout en bout.
Toujours.
Bonus : pour les curieux, Panache a rédigé un article sur "comment devenir un as du networking ?".